Nombreux sont les cavaliers avec des douleurs en selle, genoux, dos, chevilles. Pour améliorer la situation, il est nécessaire d’ajouter de l’amorti sous les pieds du cavalier. De la même façon, dans la recherche d’un confort optimal du cheval, on restreint au maximum les pressions appliquées sur son dos. Les équipements permettant d’absorber des chocs entre le cheval et son cavalier pour en limiter les impacts sont multiples : une selle adaptée, avec des panneaux (matelassures) de qualité et un arçon adapté à la discipline pratiquée, des tapis amortisseurs, des étriers techniques avec planchers amortissants, et… les étrivières, élément souvent oublié auquel nous allons nous intéresser ici.
Comment les étrivières peuvent-elles limiter les chocs transmis au cheval par son cavalier ?
Comment les étrivières peuvent-elles soulager les articulations du cavalier ?
Quel est l’impact des matériaux et de la conception des étrivières sur leur possible rôle d’amorti ?
Comment choisir au mieux ses étrivières ?
Pourquoi le choix d’étriers amortissants n’est pas toujours la meilleure solution ?
Petit tour d’horizon pour que les étrivières ne soient plus oubliées dans le « pack amortisseur » du couple cheval – cavalier.
Le rôle des étrivières
Je ne vais dévoiler aucun scoop, le rôle premier des étrivières est de porter les étriers, qui donnent un appui aux pieds du cavalier. En fonction de leur forme, elles pourront aussi aider la jambe à se stabiliser et/ou la protéger des pincements (étrivières larges, anatomiques, fenders…). Mais dans tous les cas, les étrivières restent le lien direct entre les pieds et la selle :
- Côté cavalier, elles reçoivent une grande partie de son poids et des forces inhérentes à cette masse ;
- Côté selle, elles sont portées par les couteaux porte-étrivières, qui sont rivetés directement dans l’arçon.
Elles font donc partie intégrante de l’ensemble d’outils créant le lien entre le cavalier et le cheval : tapis – selle (panneaux-arçon) – étrivières – étriers.
L’application des forces
Prenons un exemple d’application des forces.
A la réception d’un obstacle, la force verticale reçue par les antérieurs d’un cheval peut être plus de 3,5 fois supérieure à son propre poids. Un cheval de 500kg encaisse donc 1600kg dans ses pieds, tendons, articulations des membres et ligne dorsale au complet.
On peut penser que le cavalier reçoit une force d’un ratio similaire dans ses pieds : un cavalier de 70kg recevrait donc 245kg à amortir avec ses chevilles, genoux, bassin, dos, nuque.
Le principe d’action-réaction (3ème loi de Newton), nous dit :
« L’action est toujours égale à la réaction ; c’est-à-dire que les actions de deux corps l’un sur l’autre sont toujours égales et de sens contraires ».
3ème loi de Newton
En clair, à la réception de notre obstacle, la force s’applique de façon identique entre les pieds du cavalier et leur support, les étriers. Si le cavalier doit « absorber » 245kg, le support du cavalier doit absorber aussi 245kg. Le cavalier repose sur les étriers, reliés à l’arçon par les étrivières, l’arçon (la selle) est posé sur le dos du cheval, le dos du cheval doit donc absorber 245kg venant du cavalier.
(photo issue d’internet – retouche et ajout d’informations : Atelier alhéna)
Heureusement la selle est pensée pour amortir et répartir les pressions ! Une partie de ces 245 kg sera donc absorbée par l’arçon, les panneaux de la selle, le tapis. Mais il est encore possible de diminuer cette force selon 2 axes d’approche complémentaires :
- une bonne préparation physique du cavalier, qui sera à même de mieux encaisser le saut et de mieux amortir avec ses articulations, et donc de retransmettre moins de force dans les étriers ;
- une optimisation du matériel en travaillant sur l’ensemble étrier – étrivières.
Ces deux approches seront bénéfiques autant pour le cheval que pour le cavalier, le premier recevant moins d’impact dans le dos, le second ayant un retour de force moins important. Les étriers techniques ayant une fonction d’absorption des chocs sont nombreux sur le marché, je ne rentrerai pas dans leurs détails. La question à se poser est donc plutôt sur le choix des étrivières, et des bonnes combinaisons étriers – étrivières.
Impact des matériaux sur l’amorti
Les étrivières doivent être conçues dans un matériau suffisamment résistant pour ne pas céder, et non déformable pour ne pas s’allonger avec le temps. On souhaite aussi des propriétés élastiques pour permettre une absorption des chocs, sans pour autant avoir un effet ressort ou une élongation perceptible.
Etrivières nylon et biothane
La grande industrie a trouvé sa solution, sans recherche d’amorti : la sangle nylon. Les avantages sont indéniables : grande résistance à la traction, totalement indéformable, et surtout un coût défiant toute concurrence. Mais les inconvénients sont nombreux. Elle supporte assez mal les frottements et ne vieilli donc pas très bien (s’effiloche). Elle n’a également aucune élasticité et donc aucune capacité à absorber les chocs.
Une tentative d’amélioration donne la solution « sangle enduite » ou biothane. L’aspect extérieur est plastifié, avec plus ou moins d’effet grip selon les cas. Au final on aura le même résultat qu’avec la sangle nylon basique, aucun effet d’amorti et une longévité à peine améliorée, le point faible étant au niveau des trous de réglage (l’enduit plastique ayant une forte tendance à se craqueler).
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HS : Pour ceux qui seraient tentés de choisir cette solution par conscience écologique (pas d’utilisation de cuir), je rappelle que nylon, biothane et similaires sont issus de l’industrie de la pétrochimie.
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Etrivières doublées veau
On rencontre très souvent des étrivières « doublées veau ». De plus ou moins bonne qualité en fonction de la marque ou de l’artisan (différentes qualité de veau et de finitions), elles offrent un bel aspect esthétique et une longévité intéressante. Mais le veau reste relativement fragile (peausserie fine) et donc sujet aux déchirures par usure. De par leur conception, elles ne répondront en aucun cas à la problématique d’amorti. Il s’agit simplement d’une sangle nylon enrobée de veau et cousue.
Souvent de belle manufacture, plus confortables pour le cavalier de par leur toucher cuir (meilleur grip sur la selle et donc meilleure stabilisation de la jambe et pas d’échauffement), il faut être conscient qu’elles n’offrent toujours aucune absorption des chocs.
Etrivières cuir
La troisième et dernière solution que j’aborderai est la solution traditionnelle : le cuir. Les étrivières en cuir (non doublé) sont rencontrées très rarement en dehors des fabrications artisanales. Ce type d’étrivières est à ce jour la seule possibilité – à ma connaissance – qui offre une réponse à un objectif d’absorption des chocs.
Le cuir dispose naturellement d’une excellente élasticité tout en étant très résistant à la traction. Il est donc parfait pour amortir tout en garantissant une solidité suffisante. Des étrivières en cuir sellier « simple » ou doublé auront toutefois beaucoup trop d’élasticité et s’allongeront rapidement. Ce n’est donc pas une solution à retenir. En revanche, pour conserver ces propriétés tout en limitant au maximum les risques d’allongement, on choisira un cuir dit « pré-étiré ». Ce cuir subit une opération directement pendant son tannage, consistant à l’étirer à son maximum avant son séchage. Il est ainsi destiné à produire des pièces soumises à de très fortes tractions, comme des contre-sanglons et des étrivières. Utilisé sous une largeur et épaisseur suffisantes, il ne s’allongera pas dans le temps (ou seulement de manière infime).
L’utilisation d’étrivières en cuir pré-étiré est donc une réponse à notre recherche d’amorti. Elle apporte un véritable gain de confort articulaire au cavalier et complète efficacement l’ensemble « d’amortisseurs » pour le dos du cheval. La longévité sera également excellente avec un minimum d’entretien (potentiellement supérieure à 10 – 15 ans), et les réparations possibles.
Choisir la bonne combinaison étrivières – étriers
Étrivières en sangle nylon et sangle enduite ou biothane
Elles sont la solution « 1er prix », avec un seul rôle : suspendre les étriers à la selle, et peu voire pas de possibilités de réparation. C’est une solution accessible aux petits budgets, mais clairement à classer dans le consommable. Pour le confort (et la bonne santé si pratique régulière) des articulation du cavalier et du dos du cheval, il sera indispensable de les équiper d’étriers disposant d’un système d’absorption des chocs – étriers techniques qui eux ne seront pas pour les petits budgets…
Étrivières doublées veau
La présence de sangle nylon à l’intérieur élimine tout effet d’amorti. Les points positifs seront une longévité correcte (quelques années) et un contact plus agréable, mais les réparations seront limitées. C’est une solution accessible à tous les budgets (il y en a à tous les prix), mais qui offre peu d’intérêt au delà de l’esthétisme. Il sera indispensable de les associer à des étriers disposant d’un système d’absorption des chocs. Le budget global (étrivières + étriers) pourra donc être relativement conséquent.
Étrivières en cuir pré-étiré
LA solution pour combiner excellent amorti, longévité, durabilité et esthétisme. Un entretien régulier permettra de conserver toutes les propriétés du cuir (voir article sur l’entretien du cuir), les éventuelles petites déformations dues à une dissymétrie du cavalier ou des habitudes (montoir toujours à gauche par exemple) seront gommées par une simple inversion régulière des deux étrivières.
Pour un effet d’absorption des chocs optimal, on optera de préférence pour des étrivières traditionnelles (doubles branches) pour toutes les disciplines avec de forte sollicitation des articulations (obstacle, endurance…). Les monobranches seront plutôt choisies pour les disciplines de type dressage ou randonnée (cavalier restant majoritairement assis dans sa selle).
Elles peuvent être associées sans problème à des étriers simples, ce qui présente un avantage indéniable pour le budget. Si vous choisissez quand même de les associer à des étriers techniques, concentrez-vous alors sur des options permettant d’apporter du confort en fonction des préférences posturales de chacun, comme un plancher incliné ou un œil désaxé, mais sans ajout d’amorti. Les étriers avec amorti seront généralement évités afin de ne pas produire trop d’élasticité par le cumul étrivières + étriers. Cela pourrait impacter les tendons et ligaments du cavalier (cela peut toutefois être adapté à certains cas, le mieux reste de demander conseil à votre ostéopathe – humain !). Le budget global sera alors plus conséquent.
| Étrivières nylon / biothane | Étrivières doublées veau | Étrivières en cuir pré-étiré | |
|---|---|---|---|
| Résistance à l’élongation | *** | *** | ** |
| Élasticité – capacité d’amorti | – | – | *** |
| Confort articulaire du cavalier | non | non | oui |
| Complément d’amorti pour le cheval | non | non | oui |
| Nécessité d’utilisation d’étriers amortissants | oui | oui | non |
| Résistance à l’usure | * | ** | *** |
| Réparations possibles | * | * | *** |
| Facilité d’entretien | *** | ** | ** |
| Durée de vie | 1 à 5 ans | env. 5 ans | > 10 ans |
| Sensation d’échauffement | possible | non | non |
| Stabilisation de la jambe | * | ** à *** | ** à *** |
| Usure du quartier de selle | *** | * | * |
| Diversité de formes | * | *** | *** |
| Budget étrivières seules | * | * à *** | ** à *** |
Choisir ses étrivières en cuir pré-étiré
Si vous choisissez de vous orienter vers des étrivières avec amorti, sachez que le cuir pré-étiré s’adapte à toutes les formes et disciplines. Que vous recherchiez des étrivières classiques, monobranches, larges, anatomiques, ou des fenders, vous trouverez votre bonheur !
Quelques exemples d’étrivières en cuir pré-étiré fabriquées à l’Atelier Alhéna :
Toutefois, renseignez vous bien sur les caractéristiques des produits, car il peut y avoir quelques « faux amis »! Une étrivière cuir, même non doublée mais garantie indéformable, aura très certainement une sangle nylon intégrée. Ce type de montage se retrouve souvent sur les étrivières anatomiques ou larges : apparence cuir relativement épais, couture tout le tour. Le cuir est en fait seulement là pour le contact de la jambe et la forme globale, une sangle nylon est glissée à l’intérieur et assure le maintien ! A l’opposé, une étrivière anatomique peut être conçue en cuir pré-étiré, mais laisser visible un bout de sangle nylon servant uniquement à la fixation de la boucle avec le moins de surépaisseur possible… l’amorti est donc bien conservé sur l’ensemble de la longueur !
Conclusion
Les étrivières, en lien direct entre les pieds du cavalier et l’arçon, retransmettent directement les chocs et forces du cavalier au dos du cheval. C’est par leur intermédiaire également que le cavalier reçoit le « retour » des forces qu’il applique lui-même sur les étriers.
Utiliser les étrivières pour limiter ces forces et les absorber est donc une solution parfaitement adaptée à l’amélioration globale du confort du cheval et du cavalier, ce qui permet de se passer d’étriers techniques dans la grande majorité des cas. En association avec un ensemble selle – tapis adapté et une préparation physique cohérente, elles peuvent être le petit plus qui fait toute la différence.
Pour remplir ce rôle, une attention particulière sera apportée à leur conception : matériau à la fois résistant et élastique indispensable, le cuir pré-étiré est alors pour moi une évidence ! Amorti, résistance, durabilité, esthétisme, il a tous les avantages. Des étrivières traditionnelles en cuir pré-étiré, peuvent donc être la réponse simple à beaucoup de problèmes.
Penser l’amorti de son équipement de façon globale est le meilleur moyen d’assurer un confort optimal, chaque élément se complétant. Les étrivières ne doivent plus rester dans l’ombre.
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Pour découvrir mon travail –> Equipement de la selle
Références :
- FAUST C. 2021. Diminution des forces sur les étriers à la réception du saut. Journées Sciences et Innovations Équines, 20 et 21 mai 2021. Médiathèque IFCE : https://mediatheque.ifce.fr/doc_num.php?explnum_id=26077
- Lois du mouvement de Newton, Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Lois_du_mouvement_de_Newton (page consultée le 01/01/2024)
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